En 1678, l’imprimeur Parisien Jean Baptiste Coignard publie une brochure dans laquelle le grand érudit Jean Mabillon expose sa nouvelle méthode pour étudier l’histoire des institutions religieuses. Ce document de vingt-et-une pages, intitulé Lettre de dom Jean Mabillon à un de ses amis touchant le premier institut de l’abbaye de Remiremont, s’appuie sur l’analyse critique des sources médiévales relatives à cette institution pour faire deux constats. Le premier est que cette maison de chanoinesses nobles avait été fondée comme un monastère Bénédictin. Et le deuxième est que les intentions des fondateurs de l’abbaye justifient le projet de réforme bénédictine de l’abbesse Dorothée de Salm. La réponse du chapitre romarimontain est immédiate et, sans surprise, très négative : les chanoinesses accusent Mabillon de conspirer avec leur abbesse et de falsifier l’histoire en faveur d’un agenda réformateur. Il s’ensuit une polémique féroce qui ne prendra fin que vingt ans plus tard… Mais comment expliquer l’intransigeance des chanoinesses ? S’agit-il simplement d’une volonté de préserver leur état très libre de chanoinesses ? Ou bien Mabillon a-t-il vraiment falsifié l’histoire ?  

Steven Vanderputten est professeur en histoire médiévale à l’Université de Gand (Belgique). Il se spécialise dans l’étude des communautés religieuses à partir de l’époque Carolingienne jusqu’à la fin du 18ième siècle.