Rencontre avec Daniel Caquard

Est-ce que ces lieux prestigieux, comme l’Abbaye d’Etival ce soir, transforment la musique et apportent une réelle richesse ? Est-ce que le patrimoine est au service de l’art ou l’art au service du patrimoine ?
C’est élever le patrimoine comme une valeur à laquelle la musique vient l’embellir, l’illuminer et l’éclairer.
Le lieu donne une magnificence supplémentaire. La matière artistique, on la regarde autrement avec l’art et la musique. On les révèle d’une autre façon.
Ce patrimoine a été complètement reconstruit suite à la Guerre des Trente ans. Le festival de ce soir porté par la Chapelle Rhénane met en avant Heinrich Schütz et son parcours créatif. La conférence juste avant parle de cette guerre. Finalement, la programmation illustre bien l’histoire de ce patrimoine vosgien.
Ces abbayes, des lieux de travail, des lieux industriels par le passé… C’est aujourd’hui important aussi de dire aux habitants que tout n’est pas fichu et de valoriser leur patrimoine.


L’Esprit des Lieux est le thème de cette 16ème édition. Est-ce que les murs parlent et est-ce que les murs entendent ?
Oui, je pense que les pierres nous racontent ce qu’elles ont vécu. On entend leur écho, leur histoire. Cela nous permet de regarder le patrimoine autrement. Le tissu artistique n’est pas que bâtiment et pierre, c’est aussi ce qui a été vécu à l’intérieur des murs.


Ce mélange de format concerts / visites / conférences / rencontres vous permet de valoriser le patrimoine des abbayes et ce patrimoine musical de manière plus complète ?
Cela répond aux attentes de tout le public. Certains aiment ce mélange et viennent pour comprendre et apprendre. Les conférences ont pour rôle de remettre dans le contexte et de parler des lieux et de leur histoire. D’autres viennent pour le plaisir et participent juste au concert.




Vous avez une réelle ambition de sensibiliser la jeune génération au répertoire musical proposé par le festival et avez mis en place des actions scolaires étroitement liées au festival. Quels sont les challenges rencontrés ?
Le répertoire est assez varié : baroque, contemporain, classique. Nous avons installé un moment musical pendant 3 jours in situ pour des jeunes. On leur donne le choix, mais on ne les conforte pas. Il faut qu’ils restent curieux.
Ce n’est pas toujours évident de sensibiliser, mais même si ça reste au fond du cerveau, la bulle est là et peut s’ouvrir plus tard.
Et puis il faut avoir goûté pour dire j’aime ou je n’aime pas. Nous leur offrons la possibilité d’entendre. Et parfois, nous avons de belles surprises que nous pouvons considérer comme des victoires.
Quelle a été la réaction des élèves (écoliers, collégiens, lycéens) qui n’ont pas l’habitude de ce répertoire et de cet environnement ?
Ce serait prétentieux de dire que tout est gagné. Il existe une espèce d’opposition « c’est pas moi, ce n’est pas pour moi » et les barrières sont difficiles à lever. Parfois les barrières viennent des parents. Parfois les barrières viennent de l’adolescent et sa nature rebelle qui n’aime que ce qu’il ou elle a décidé d’aimer.
Comment expliquez-vous le succès du festival qui a fêté ses 15 ans il y a peu ?
Je ne sais pas… C’était un pari au départ. On nous a dit que ce n’était pas fait pour ici. Le 1er concert, nous n’avions pas fait de publicité ou communiqué vers l’extérieur et il y a eu une forte participation des habitants du coin. On a réinventé leurs lieux et ils étaient fiers.
Puis un noyau de fidèles a entraîné d’autres.
Mais ce n’est jamais gagné.
Vous mettez beaucoup d’énergie dans les collaborations en tout genre :
– partenariats avec d’autres associations et institutions partageant les mêmes objectifs
– collaboration pour vos actions scolaires avec par exemple cette année l’Orchestre National de Metz ainsi que des établissements scolaires des Vosges
– collaboration avec des artistes en résidence comme « Les Lunaisiens » pour les 3 années à venir
… la collaboration artistique pour vous c’est primordial ? Pourquoi ?
Qui peut prétendre tout savoir ? La richesse apportée par ces collaborations n’est pas à négliger. Cela ouvre des portes qu’on imaginait pas exister.
On ne peut pas tout faire tout seul. Chacun apporte son savoir (logistique, réseau, artistique, etc…).
Pour plus d’informations sur l’association Entreprise et Culture en Lorraine et le Festival des Abbayes
Site web : https://festivaldesabbayeslorraine.com
Page Facebook : Festival des Abbayes en Lorraine
Pour plus d’informations sur La Chappelle Rhénane
Site web : http://www.chapelle-rhenane.com/
Page Facebook : ChapelleRhenane
Crédits photos : ©CD88/MEghtesad
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